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Nouvelles représentations de l'Espagne franquiste dans le roman graphique (Arras)

Nouvelles représentations de l'Espagne franquiste dans le roman graphique (Arras)

Publié le par Marc Escola (Source : Jaime Céspedes)

Nouvelles représentations de l'Espagne franquiste dans le roman graphique. 

IIe journée d'études "BD-Histoire".

 

Le laboratoire Textes et Cultures de l'Université d'Artois (EA 4028, ED 473 Sciences de l'Homme et de la Société) consacre sa deuxième journée d'études "BD-Histoire" aux Nouvelles représentations de l'Espagne franquiste dans le roman graphique, le mardi 5 mars 2019 à la Maison de la Recherche, campus d'Arras. La première journée a eu lieu le 13 avril 2018.

L'étude de la bande dessinée à l'époque franquiste (1939-1975) a fait l'objet de plusieurs travaux qui ont souligné les enjeux sociaux, doctrinaux et politiques d'un genre particulièrement contrôlé par la censure de par sa capacité à faire passer des critiques dans un style riche en connotations et en déformations graphiques et verbales, souvent par le biais de l'humour. Bien que tout fût soumis à l'idéologie franquiste et à celle du parti unique (la Phalange), la bande dessinée espagnole faisait preuve d'une grande qualité artistique qui fait encore aujourd'hui l'objet de rééditions et d'études critiques. Des ouvrages tels que Los cómics del franquismo de Salvador Vázquez de Parga (1980), La España del tebeo de Antonio Altarriba (2001) et Viñetas del pasado. Los cómics como fuente para el estudio de la historia (2013) de Óscar Gual insistent sur les valeurs idéologiques et identitaires des productions classiques de l'époque franquiste.

Dans cette journée, nous nous intéresserons principalement aux productions réalisées ces vingt dernières années. Elles montrent un intérêt renouvelé pour l'époque franquiste de différentes façons et avec des intentions bien diverses. Si cette époque a été moins traitée pendant les années de la Transition, malgré quelques exceptions, à partir des années 1990 et surtout au début du XXIe siècle les nombreux romans graphiques et les nombreuses BD sur la société franquiste témoignent de l'intérêt que les dessinateurs, l'industrie éditoriale et les lecteurs portent à cette époque si longue et marquante. Les discussions autour de la Loi pour la Mémoire Historique de 2007 ont inspiré des problématiques liées à la récupération de celle-ci, à la façon dont le passé devrait être transmis aux nouvelles générations et à la notion polémique de 'devoir de mémoire', sujet central de Dolorès de Bruno Loth (2016).

Certains ouvrages de la fin du XXe siècle et du début du XXIe siècle font l'éloge des personnages et même des dessinateurs de l'époque franquiste, dont Le Piège (El artefacto perverso en espagnol) du dessinateur Federico del Barrio et du scénariste Felipe Hernández Cava (1994). L'Hiver du dessinateur de Paco Roca (2010) est consacré aux grandes difficultés d'un groupe de dessinateurs de Bruguera pour créer leur propre publication (Tío vivo) en 1957. La figure de Federico García Lorca a fait l'objet de deux ouvrages qui s'intéressent à des enquêtes sur les circonstances de sa mort réalisées pendant le franquisme : Sur les traces de García Lorca du scénariste Carlos Hernández et du dessinateur El Torres (2011) et La araña del olvido de Enrique Bonet (2015). D'ailleurs, une troisième BD s'intéresse à son séjour à New York, lors du crash de 1929 et ses conséquences, surtout pour sa poésie : Lorca, un poeta en Nueva York de Carlos Esquembre (2016). Dans Cuerda de presas (2005, rééditée en 2018) le scénariste Jorge García et le dessinateur Fidel Martínez consacrent onze récits à la répression des femmes pendant l'après-guerre. Jaime Martín adapte dans Les Guerres silencieuses (2013) l'expérience de son père comme jeune soldat pour traiter des conflits de l'armée espagnole au Maroc au début des années 1960 dans une guerre qui ne disait pas son nom. Fran Jaraba a publié un ouvrage sur La División Azul (2013) dans laquelle un communiste s'infiltre dans les troupes phalangistes qui se battent en Russie pendant la IIe Guerre Mondiale. Les ouvrages écrits par le scénariste et professeur Antonio Altarriba feront l'objet d'une attention particulière, dont L'Art de voler (2009) et L'Aile brisée (2016), dessinées par Kim. Dans ces deux ouvrages, la façon dont les conflits sociaux de l'époque déterminent la vie de ses parents est mise en avant et permet de revisiter des aspects parfois sinistres de la société franquiste. Plus récemment, Carlos Giménez a donné suite à sa série célèbre Paracuellos, qui s'inspire de son propre vécu dans les foyers d'Auxilio Social pendant les années de l'autarcie franquiste. Les Espagnols qui se trouvaient à l'étranger ont aussi leur place parmi les romans graphiques consacrés à cette époque, comme l'a très récemment montré le récit autobiographique Nieve en los bolsillos de Kim (2018), consacré à son séjour en Allemagne en 1963. Dans El solar (2016) Alfonso López s'inspire des personnages Petra et Carpanta en 1947 pour créer un récit plein d'humour et de topiques de l'époque franquiste. Nous pourrions donner davantage des exemples mais citons pour finir un autre travail plein d'humour et d'ironie, Nosotros llegamos primero, de Furillo (2014), sur la mission fictive d'envoyer une équipe d'astronautes sur la Lune avant les Etats-Unis.

Les communications pourront porter sur la façon dont ces ouvrages et d'autres articulent les histoires personnelles, les histoires collectives et les faits historiques, sur la façon dont la petite histoire est au service de la grande Histoire et de la mise en perspective de la société franquiste, sur l'influence profonde de la Loi pour la Mémoire Historique et de sa nouvelle dimension éthico-politique, sur la façon dont le passé franquiste est revisité et réinterprété selon les conditionnements du présent, sur les motivations des auteurs et des maisons d'édition, sur la façon dont la relation entre les voix narratrices et les voix du passé est établie, sur la réception des BD et des romans graphiques parmi les lecteurs et dans les médias, sur les valeurs que ces productions apportent à la culture historique et à l'histoire culturelle, sur la façon dont le roman graphique est capable de réadapter son propre langage séquentiel pour traiter des contenus historiques transcendants et pour remplir le rôle didactique qui se superpose à son rôle traditionnel comme moyen de divertissement.

Certains ouvrages traitent de l'époque franquiste et la dépassent, comme L'Art de voler, mentionné ci-dessus. Dans la mesure où le contexte de l'époque franquiste est nécessaire pour comprendre un ouvrage, celui-ci pourra faire l'objet d'une communication dans le cadre de ce séminaire. Une communication pourra être consacrée à un ouvrage ou à plusieurs à travers une thématique ou une problématique commune. Elle pourra se situer dans le franquisme dans son ensemble ou concerner une de ses étapes. Elle pourra s'intéresser aux représentations des différents aspects qui faisaient partie de la société à l'époque franquiste. Elle pourra enfin s'intéresser à la fonction des notes historiques et des annexes qui accompagnent souvent une BD et qui orientent les lecteurs. Les différentes approches dont le roman graphique et/ou la BD (pour ceux qui en font la différence) ont fait l'objet sont les bienvenues : historique, sociologique, idéologique, culturelle, médiatique, artistique, etc., ainsi que les approches intermédiales qui s'intéressent aux nombreux rapports entre la photographie, le cinéma, la littérature (entre autres) et le roman graphique.

Cette journée s'inscrit dans le cadre du DIM 2 de l'Université d'Artois, en particulier dans l'axe "Construction des identités et leurs renouvellements". La dimension identitaire sera en effet mise avant dans les analyses des représentations bédéiques dont il sera question, ainsi que la comparaison entre différents ouvrages ayant traité des mêmes questions à des époques différentes, avec des styles et des intentions différents. Le renouvellement des thématiques et des lieux communs sur lesquels l'identité de l'Espagne franquiste s'est formée fera partie des réflexions proposées dans cette journée, ainsi que la façon dont les nouvelles perspectives idéologiques problématisent les anciennes et entrent en conflit avec d'autres perspectives récentes. Il est aussi question de transculturalité dans la mesure où une époque dont les repères culturels ont toujours été stables à cause de la censure est revisitée à une époque caractérisée par le multiperspectivisme.

La publication d'un volume collectif avec les travaux présentés lors des deux journées est envisagée.

Date limite de réception des propositions : 08/01/2019.

Confirmation de l'acceptation : 15/01/2019.

Journée d'études : 05/03/2019.

Nombre de participants : 6 (maximum).

Durée des communications : 30 minutes (maximum).

Langues acceptées pour la communication : français, espagnol, anglais.

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Envoi des propositions et contact : Jaime Céspedes (jaimecespedes@yahoo.fr), membre du comité éditorial de L’Entre-deux, revue du laboratoire Textes et Cultures (EA 4028) de l'Université d'Artois. Responsable du Séminaire sur les médias du Master MCCT à l'Université Paris 7.

Comité d'organisation : Jaime Céspedes et Clément Duplouy.