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Mémoires atypiques: regards croisés (Saint-Étienne)

Mémoires atypiques: regards croisés (Saint-Étienne)

Publié le par Marc Escola (Source : Association alt.516)

Mémoires atypiques : regards croisés

Journée d’étude – 14 juin 2019

Université Jean Monnet, Saint-Étienne

 

Cet appel à contribution concerne la deuxième édition des journées d’étude organisées par l’association alt.516 des doctorant·es d'Arts, Lettres et Langues de l’Université de Saint-Étienne. Ces journées d’étude ont pour objectif de faire dialoguer et se confronter les travaux de jeunes chercheur·euses, en croisant des approches de différentes disciplines autour d'une thématique commune. Le thème retenu cette année est celui de la mémoire.

 

Étudier aujourd’hui la mémoire nécessite pour le ou la chercheur·euse d’acquérir une vaste culture critique, sous peine d’enfoncer des portes déjà cent fois ouvertes. Ce thème, abondamment traité, peut en effet compter sur plusieurs traditions philosophiques, historiographiques ou littéraires, dans lesquelles fourmillent les références canoniques et incontournables. Mais si la richesse de ces traditions n’est plus à démontrer, il faudrait néanmoins prendre garde à ne pas substituer la bibliothèque à l’objet d’étude.

Les images ou les métaphores qui accompagnent mécaniquement la réflexion sur la mémoire témoignent de ce risque. Beaucoup d’entre elles ont perdu leur pouvoir explicatif en devenant des lieux communs de la critique : le palais, le magasin, le théâtre, l’empreinte dans la cire, la trace, le pli… Ces images n’ont-elles pas, à l’instar de la madeleine de Proust, perdu de leur saveur ou de leur authenticité à force d’être ressassées ? …

Un paradoxe s’impose cependant : les auteur·es qui se sont interrogé·es sur les rapports de la mémoire au savoir n’ont eu de cesse que de pointer les dangers d’une connaissance qui ne serait que livresque. Montaigne prévient ainsi : « savoir par cœur n’est pas savoir : c’est conserver ce que l’on a confié à sa mémoire ». Flaubert revient sur cette idée de manière impertinente dans son Dictionnaire des idées reçues : « Mémoire. Se plaindre de la science, et même se vanter de n’en pas avoir. — Mais rugir si on vous dit que vous n’avez pas de jugement ».

En accord avec l’esprit de l’association alt.516, la journée d’étude « Mémoires atypiques : regards croisés » voudrait ainsi réunir de jeunes chercheur·euses intéressé·es par cette question et qui souhaiteraient explorer de nouvelles pistes concernant la mémoire. Notre volonté n’est pas de laisser de côté ou de faire l’économie des travaux sur ce sujet mais de les mettre à l’épreuve des faits.

La journée d’étude entend, en conséquence, mettre en avant une pensée par cas de la mémoire. On donnera la priorité aux interventions qui chercheront moins à appliquer une théorie qu’à rendre compte, dans une perspective plus empirique, d’une manifestation ou d’une représentation atypique de la mémoire, qui aille à l’encontre des clichés ou qui dérange les théories. L’enjeu serait de se confronter à la présence dérangeante ou déconcertante de cas originaux. En donnant la parole à des faits complexes, on espère ainsi gagner en réflexivité critique par rapport aux théories et aux concepts disponibles.

Tant qu’elles s’attachent à de tels cas atypiques, des communications de toutes les disciplines seront les bienvenues. Elles pourront notamment concerner des cas qui relèvent de ces trois grandes catégories (les exemples indiqués à la suite des titres en gras n’étant que des illustrations) :

1. Des cas réels de mémoire, observables ou restituables à partir d’archives ou de récits subjectifs. Comment, par exemple, rendre compte de la façon dont de jeunes générations héritent d’une mémoire léguée par leurs ascendant.es (récits de guerre, des origines, de traumatismes, etc.) ? Cette mémoire d’un événement auquel nous n’avons ni assisté ni participé est difficile à appréhender avec les concepts traditionnels. Dès lors que les souvenirs se transmettent, il faut repenser les rapports de la mémoire à l’individu, et les rapports de la mémoire au réel. Une telle étude de cas pourrait ainsi être l’occasion de mettre à l’épreuve la notion de « postmémoire », théorisée par Marianne Hirsch dans Family Frames: Photography, Narrative and Postmemory  (2012) : « La postmémoire caractérise l’expérience de ceux qui grandissent dominés par des récits d’événements ayant précédé leur naissance, de ceux dont les histoires personnelles tardives sont évacuées par les histoires de générations antérieures, formées par les événements traumatiques, et qui ne peuvent être ni comprises ni recréées. » (on traduit).

2. Des cas fictifs ou mystiques de mémoire dont les représentations, même lorsqu’elles sont impossibles, interrogent nos conceptions et nos théories. Que penser, ainsi, du souvenir d’un moment futur, comme celui exposé dans La Jetée de Chris Marker ? Bien que le cadre temporel soit fictif, le film tient un discours sur la mémoire réelle. De la même façon, la mémoire d’une vie antérieure, qui intervient de manières diverses chez Platon, Pythagore ou sous la plume de romanciers comme Rétif de la Bretonne, peut, malgré son étrangeté, nous apprendre des choses sur les fonctions ou l'imaginaire associés à la mémoire.

3. Des cas tenant à des désignations inattendues de phénomènes par le terme mémoire. Exemple parmi d’autres, au xixe siècle, plusieurs auteurs assimilent l’observation des hommes à une « mémoire », comme dans cette phrase de Balzac : « L’observation ne serait-elle qu’une sorte de mémoire propre à aider cette mobile imagination ? Je commence à le croire. » Une telle désignation a de quoi surprendre : comment l’observation, attention au présent, acte perceptif qui se déroule dans l’instant, peut-elle être désignée comme une forme de mémoire ?

Ce mode de réflexion, qui prend source dans la casuistique et qui connaît des théorisations plus contemporaines (comme dans l’ouvrage Penser par cas de Jean-Claude Passeron et Jacques Revel) ouvrira naturellement sur la discussion et la co-création du savoir. Cet échange, que nous voulons interdisciplinaire, nous semble d’autant plus souhaitable que dans les études sur la mémoire, chaque discipline semble avoir ses méthodes et ses champions : Marcel Proust pour les littéraires, Maurice Halbwachs pour les sociologues, Henri Bergson ou Paul Ricoeur pour les philosophes, Pierre Nora pour les historiens… Cette nouvelle journée d’étude entend ainsi travailler à la frontière de ces différents savoirs.

 

CALENDRIER

– Soumission des résumés : 30 janvier

– Notification aux auteurs : 15 février

– Journée d'étude : 14 juin

 

CONTACT

alt516@protonmail.com

 

SOUMISSION

Les propositions de communication (résumés au format .doc ou .pdf, de 300-350 mots), accompagnées d’une brève biographie de leur auteur.e, sont à envoyer par courrier électronique (alt516@protonmail.com), avant le 30 janvier 2019.

Les frais de déplacements seront à la charge des participant·es.

 

COMITÉ D’ORGANISATION

Association de doctorant·es alt.516