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Le passé des autres et l'expérience de l'histoire au Québec (XIXe-XXe s.) (Revue d’histoire de l’Amérique française)

Le passé des autres et l'expérience de l'histoire au Québec (XIXe-XXe s.) (Revue d’histoire de l’Amérique française)

Publié le par Marc Escola (Source : Daniel Poitras)

Le passé des autres et l'expérience de l'histoire au Québec (XIXe-XXe s.)

De l’interprétation par les Canadiens du XIXe siècle des révolutions française et belge à celle par les Québécois de la Révolution tranquille de l’histoire des pays récemment décolonisés, le passé des autres a été l’objet d’appropriations nombreuses. Si les représentations de ce passé sont en général bien connues, ses appropriations et ses utilisations le sont moins. L’objectif de ce projet est d’explorer l’appropriation d’événements, d’expériences ou de mythes de l’histoire étrangère par les Québécois à des fins à la fois de relectures de l’histoire du Québec et de mobilisation du passé pour transformer la société.

C’est dire que les acteurs qui nous intéressent ne concernent pas seulement les historiens, mais également les groupes politiques et religieux, les revues d’idées, les syndicats, les mouvements étudiants, etc. Comment le passé des autres s’articule-t-il avec l’histoire locale et de quelle façon la sensibilité à son égard met en jeu le champ d’expérience et l’horizon d’attente des acteurs ? Cette question se pose aujourd’hui avec d’autant plus d’acuité que les recherches sur le nationalisme et sur les échanges transnationaux tendent à tracer des parallèles inédits entre des expériences nationales par-delà les frontières. Malgré l’apparent repli sur soi que le nationalisme peut inspirer, c’est souvent en regardant chez les voisins que l’on trouve le cadre nécessaire à la constitution du national tout comme à sa réinterprétation.

Parmi les questions que nous posons pour ouvrir des pistes de réflexion : comment la perception de l’histoire du Québec est-elle affectée par un regard comparatif ou par la prise en compte d’une perspective transnationale ? Comment un événement étranger, par exemple une lutte sociale, est-il approprié afin de susciter une prise de conscience, mobiliser un groupe ou enclencher une réforme ? Quelle donnée particulière de la sémantique des temporalités historiques (le « progrès », le « rattrapage », « l’accélération de l’histoire », etc.) d’un contexte étranger retient l’attention et sert à transformer une lecture de l’histoire locale ou nationale ? De quelle façon les modalités de circulation d’un élément de l’histoire étrangère – à travers les voyages, les enquêtes, les revues, etc. – influencent-elles son appropriation et son utilisation ?

Les objets et thématiques qui permettent d’aborder ces questions sont nombreux. Pour donner quelques exemples :

* La comparaison entre l’histoire québécoise ou canadienne et celle des peuples révolutionnaires des années 1830, tels le Chili, la Pologne, la Belgique et la France, afin de justifier les revendications réformistes et patriotes.

* L’histoire du catholicisme et des mouvements catholiques en Europe, qui sera marquante, notamment, pour les Jeunesses étudiantes et ouvrières catholiques au Québec, qui s’approprieront « l’esprit », mais aussi les marqueurs temporels des mouvements outre atlantique.  

* Les mouvements de décolonisation, du Tiers-Monde ou des Civil Rights, qui pousseront plusieurs Québécois à puiser dans ces histoires étrangères pour relire leur propre à histoire en fonction de repères associés, par exemple, à l’émancipation nationale ou à la révolution.

* L’histoire des pensées socialistes ou coopératistes en Europe, qui sera appropriée au Québec par des acteurs aussi différents que le clergé, les chercheurs et les militants des années 1930 aux années 1970

* La reprise du discours historique nationaliste européen ou américain dans les commémorations ou dans l’architecture québécoises de la fin du XIXe siècle. On pense entre autres à l’architecture de style Second Empire, qui caractérise par exemple le bâtiment de l’Assemblée nationale à Québec.

* L’appropriation de périodisations étrangères, par exemple le « Moyen âge », la « Renaissance », la « résistance », etc., afin de reproblématiser l’histoire locale ou de marquer une transformation.

* Les discours concurrents à propos de l’appropriation de l’histoire de France selon qu’on adopte une grille de lecture cléricale ou républicaine, maurassienne ou personnaliste, etc., et l’impact de ces lectures sur la lecture ou l’écriture de l’histoire au Québec.

* Les politiques de développement économique ou social et l’appropriation de modèles passés étrangers, qui impliquent non seulement des contenus, mais également une expérience de l’histoire à travers des enjeux chargés temporellement comme le progrès, l’évolution normale, la tension entre le particulier et l’universel, etc.

Nous invitons les contributeurs intéressés à participer à ce numéro à nous faire parvenir une proposition d’article de 500-1000 mots pour le 25 janvier 2017 à l’une des deux adresses suivantes : daniel.poitras01@gmail.com et maximerdufour@gmail.com

Si votre proposition est retenue, vous aurez jusqu’au 25 août pour soumettre un article en bonne et due forme (9000 mots incluant les notes). Les articles seront publiés dans un numéro double de la Revue d’histoire de l’Amérique française.

 

Daniel Poitras (postdoctorant à l’Université de Toronto)

Maxime Raymond-Dufour (doctorant à l’Université de Montréal)